Gastronomie

Sénégal – Le Ceebu jen : Une merveille culinaire reconnue par l’ONU, ancrée dans l’héritage culturel immatériel. Un mets de robustesse et de ténacité.

Le 15 décembre 2021, l'UNESCO a célébré le Ceebu jen en l'inscrivant au patrimoine culturel immatériel de l'humanité. Au-delà de sa délicieuse réputation culinaire, ce plat traditionnel sénégalais nous raconte une histoire riche et savoureuse.

En décembre 2021, la gastronomie sénégalaise a fait un grand pas en avant avec le ceebu jen, une expression wolof qui se traduit littéralement par « riz au poisson », plus familièrement appelé « thiéboudiène ». Ce plat emblématique a été mis à l’honneur en étant inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO. Ce mets sénégalais est tellement délectable qu’il a conquis le palais de tout un continent. Il s’étend désormais bien au-delà des frontières du Sénégal pour rayonner dans toute l’Afrique.  « Je me réjouis de voir le ceebu jën, délicieux plat emblématique du Sénégal, figurer désormais au prestigieux patrimoine immatériel de l’Unesco ». L’ex Président Macky Sall a applaudi cette percée mondiale de la gastronomie sénégalaise.

Il existe une multitude d’endroits où savourer le tieboudiène, et à peu près autant de façons de le cuisiner. Dans tous les coins et recoins du Sénégal, selon Alioune Badiane, rapporteur de la Commission art, culture et civilisation du vaste projet d’Histoire générale du pays, « chaque individu a sa propre manière de préparer le tieboudiène ; il n’y a pas de recette identique à une autre ».

Comme commencent Penda Mbaye.

Pour remonter aux origines du plat le plus emblématique du Sénégal, il faut remonter au siècle dernier. L’histoire naît dans le populaire quartier des pêcheurs de Guet Ndar, à Saint-Louis, alors capitale de l’Afrique occidentale française (AOF). Dans ce coin de la ville où, chaque jour, les pirogues débarquent le poisson pêché, une cuisinière s’est fait connaître pour son riz au poisson : Penda Mbaye (1904-1984).

Penda Mbaye
Penda Mbaye

Penda Mbaye était une cuisinière originaire du Walo, l’actuel département de Dagana. Elle gagnait sa vie en faisant la cuisine lors des cérémonies familiales. Un jour, elle a eu l’idée de modifier la façon de cuisiner le riz au poisson. « Lors des cérémonies familiales ou officielles, il fallait contenter les invités par la quantité de nourriture, mais aussi par l’originalité du plat ». Penda Mbaye a eu l’idée de colorer le riz, non pas avec le concentré de tomates que l’on trouve dans la plupart des tieb aujourd’hui, mais avec des tomates cerises, plus colorées et plus goûteuses. Le riz blanc est alors devenu le riz rouge, raconte Alioune Badiane.

Son astuce commence ainsi à se répandre dans la ville et toutes les femmes l’adoptent. Puisque le résultat enchante toutes les grandes maisons de Saint-Louis. Ainsi, Penda Mbaye acquiert une notoriété grandissante. Et depuis cette époque, le plat national sénégalais connaît une nouvelle version qui se popularise. De nos jours, le « Ceebu Jen Penda Mbaye » est agrémenté d’une sauce avec de petites boulettes de poisson appelées « diaga » dont tout le monde raffole.

Technique, transmission et résilience

Le tieboudiène, plus qu’une technique, un héritage à transmettre, souligne Aïssatou Mbaye. Le secret du tiéboudiène n’est pas la recette stricte. En cuisine Sénégalaise, l’oral est essentiel. En observant la cuisinière et en étudiant ses techniques, on peut percer les mystères de « la main de la cuisinière », de ses astuces bien gardées. Avec joie, elle partage sa recette familiale transmise de génération en génération.

Déguster du Jollof Rice en Gambie ou du riz au gras au Mali.

Le célèbre plat « riz au poisson » en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale (comme le Djoloff Rice en Gambie ou le riz au gras au Mali) représente l’histoire et la résilience du peuple sénégalais.

Avant les colons, le riz n’était pas dans nos assiettes, selon Abdoul Aziz Guissé, gardien des trésors culturels au ministère de la Culture. Pendant la colonisation, une politique a été instaurée pour orienter le Sénégal vers une économie agricole rentable. Les habitants du Walo, au Sénégal, ont vite adopté cette pratique en y ajoutant du poisson ou de la viande. En étant résilient, cet ingrédient difficile a créé un plat emblématique de la cuisine nationale.

Au-delà de sa simple inscription, l’élévation de ce mets emblématique au rang de patrimoine immatériel de l’Unesco revêt une dimension politique. Une lueur d’espoir pour un pays toujours en proie à l’importation de denrées alimentaires, tandis que les pêcheurs locaux, redoutant l’épuisement de leurs ressources, s’insurgent contre la prolifération des accords maritimes favorisant les étrangers.

Source : Ceebu Jën, « l’art de Penda Mbaye » de Papis Niang sur Jeune Afrique : CEEBU Jen

 

 

 

 

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